Extrait de l'article "Le livret invisible de 1914" de Caroline Masini et Maria-Clara Ferrer, écrit à partir de l'entretien réalisé avec la dramaturge tchèque Marta Ljubkova, librettiste de la pièce 1914 de Robert Wilson, entretien réalisé lors du Festival Reims Scène d'Europe dans le cadre du colloque "Les Nouveaux matériaux du théâtre" organisé par le Groupe de Recherche sur le drame moderne et contemporaine de l'Université Paris 3.
- " (...), Il
s'agirait d'abord de partir du constat que l'écriture de la
représentation et ses modes de notation se modifient et avec elles
le rôle du dramaturge et le projet livresque qui l'accompagne. D'un
côté l'auteur de théâtre apparaît sous une nouvelle figure,
multiple : celle du narrateur, de l'historien, du scripteur, du
librettiste: celui qui agence entre eux des documents issus de
sources diverses dont il compile/compose un agencement et dont la
destination scénique semble appréhendée dès l'écriture sur la
page. De l'autre, le texte de théâtre, qui ici, semble échapper à
toute capture, tant il apparaît difficile de lui reconnaître ses
possibilités d'autonomie, de transmission et de reproductibilité.
Partir
d'un constat de disparition reviendrait à conclure et peut-être un
peu vite à l'extinction du texte de théâtre et de son auteur au
profit d'une écriture du montage où la mixité des éléments qui
la compose viendrait recouvrir bien plus que la primauté du texte de
théâtre mais son existence même. Si ce n'est pour éviter un
processus de deuil, il faudrait peut-être avancer l'hypothèse d'un
nouveau texte de théâtre, tant dans son processus d'écriture que
dans sa forme livresque et ouvrir l'oeuvre dramatique à l'analyse
des conditions littéraires, scéniques et éditoriales à son
émergence, sa production et sa conservation".

Fig. 2: Mystère du Jour du Jugement, Besançon