"Finalement j'ai vu que rien ne laissait son empreinte sur personne car tout le monde estime avoir toujours quelque chose de mieux et de plus important à penser. En général, je suis tombé sur des têtes de nœuds passées maîtres dans l'art de faire traîner ou d'esquiver. Et j'ai vu comment leur vie à tous se réduisait à faire traîner tout ce qui venait de l'extérieur, considéré comme un problème, jamais comme source de plaisir. Personne n'était vraiment prêt à partager quoi que ce soit. Et personne n'avait l'ambition de conclure, d'épuiser l'instant. Tout le monde voulait prolonger l'instant jusqu'à sa dissolution, voir l'intense, perdre son odeur, perdre sa forme, s'évanouir et n'être plus ni inquiétant ni menaçant. Toute ma vie j'ai rencontré ce genre de gens, de tristes magiciens qui faisaient disparaître dans des tours prévisibles, de mauvais tours de passe-passe, des moments vrais, des moments qui promettaient la beauté. Ces instants réclamaient de l'audace mais personne n'avait les couilles pour ça. Parce que la beauté faisait toujours et exclusivement son apparition dans l'incertitude. La beauté s'insinuait, attendait, nous réclamait. Tant de fois on nous a appelés et nous n'avons pas écouté ces voix, ou nous n'avons pas voulu les écouter parce qu'elles n'étaient pas des voix reconnaissables, alors nous avons fait l'autruche. Nous avions une occasion unique de nous promener, déboussolés, et nous choisissons de fuir. Partir nous réfugier, comme d'habitude, dans le familier. Nous interdisions à notre prochain pas d'être un faux pas. Alors qu'un pas qui a du sens, un véritable pas, est un faux pas".
Rodrigo Garcia, In. Et balancez mes cendres sur Mickey, §.25
Rodrigo Garcia, In. Et balancez mes cendres sur Mickey, §.25
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