lundi 28 novembre 2011

Point Limite Zéro

Un titre et quelques mots à découvert sur mon projet grec. Peut-être pour affirmer, se mettre en frontal dans la perspective de ligne de fuite vers la Grèce et entrer en écriture. Oui il s'agit donc bien d'un projet tout nouveau, tout récent et fraîchement ou chaudement sorti de ma boîte à gants, coincé entre mes cartes, mes plans, ma lampe de poche, quelques pansements et l'arme qu'aurait pu contenir cette réserve. Il est donc encore une fois question de déplacement - peut-être même en voiture - toujours question d'une écriture en mouvement, en marche, en rythme, accentuée par mes pas sur une terre en faillite.

Il s'agit encore d'une écriture de l'écoute, une écriture post-écoute ou en simultanée, il s'agit toujours de sons, de radio, de poste radio dans une voiture en marche - une envie de me fabriquer un cockpit, une sorte de machine à écrire sur la route, une cabine d'écriture et d'enregistrements, une voiture-outils.

Qu'est-ce donc qu'une écriture sur une terre en faillite? Quelle  langue sur une terre d'héritage ? Qui parle et qui est endetté? Qui doit se présenter aujourd'hui sur la colline d'Ares, haut lieu du premier tribunal humain qui soulagea Oreste de son crime, leva la malédiction des Atrides et ouvrit la voie à ce que l'on nomme aujourd'hui en crachant par terre: la démocratie?


Point Limite Zéro est un titre emprunté, parce que ce projet n'est peut-être qu'une histoire d'emprunt, de dette, de faillite, d'héritiers donc de fantômes. Ce titre donc emprunté au road-movie Vanishing Point dans sa traduction française: Point Limite Zéro.

Pourquoi la Grèce? Parce que la Grèce. Ça devrait être suffisant et bien sûr ça ne l'est pas, parce que rien n'est suffisant à ce stade là! Pourquoi, Parce que c'est comme un besoin urgent de me rendre sur place, un sur place collectif, faire acte de cran d'arrêt, un besoin non pas de constater l'effet d'une crise mais de me déplacer dedans, comme si la possibilité de justice, d'horizon s'y logeait, comme sur le modèle du point de fuite en peinture, à travers le trou et dans le miroir, se logerait la représentation. Comme si l'absence totale de perspective, d'horizon, comme dit Derrida était la condition à la justice, au surgissement du point de fuite. Point Limite Zéro est une recherche de perspective

Et si ce n'est pas encore assez, je dirais simplement, pour aller payer ma dette et exiger de chacun qu'il se présente et s'explique, la Grèce me semble être le lieu idéal pour se présenter et trancher.

Pourquoi la Grèce, parce qu'Electre. Encore un emprunt, à l'Orestie cette fois, d'Eschyle. 

J'emprunte la figure d'Electre très librement et sans complexe mais avec quand même quelques scrupules.  Une sorte d'Electre collective. Une Electre héritière. Je ne garde d'elle que celle qui n'a pas agit, l'héritière coincée entre ses droits de successions et le frère vengeur travesti, baignant dans le jus familial sans parvenir à trancher. Je fais d'Electre une figure collective, celle de l'héritière contemporaine mais je la fais agir. C'est elle qui coupera le fil ininterrompu des crimes et de la machine nucléaire. C'est elle qui nous mènera tous vers Athènes, pour qu'on s'explique. Qui le voudra entrera dans la voiture d'Electre pour s'expliquer et faire le voyage. Une fois dehors, sortis de la voiture, on ne parlera plus, je n'écrirai plus rien, on ne fera qu'écouter, il faut espérer qu'à ce moment-là tout se diffusera.

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